Traversée de Ténérife par le Teide

Ça grimpe

J‘étais frustré de ne pas avoir terminé ce voyage comme je l’avais prévu. Cloué sur le lit d’un petit hôtel du village de Vilaflor, je regarde par la fenêtre. Lorsque les nuages se lèvent, j’aperçois le sommet du Teide, ce volcan qui me nargue depuis quelques temps.

La patronne de la maison frappe. Je lui dis d’entrer.
“Vous n’allez pas mieux on dirait?”
“Un peu mieux si, mais c’est trop tard. Je reviendrai.”

Traversée de Ténérife par le Teide

6 mois plus tard

Je suis de retour sur l‘île. Je viens d’assister aux incroyables fêtes de la Orotava, défilés, déguisements, processions religieuses et foule en liesse. J’ai adoré l’ambiance et je la recommande à tout le Monde. Je suis aussi heureux de me retrouver seul pour le projet qui m’a fait revenir sur l‘île : l’ascension du Teide au départ de la mer. L’idée est simple, monter au sommet depuis une petite plage du nord de l‘île, la playa del socoro. C’est parait-il le chemin le plus direct.

Le parcours

La montée peut-être découpée en 5 étapes calquées sur la topologie et l’hydrologie de l‘île :

★ du bord de mer jusqu‘à l’altitude de 1000m à 1500m environ, dans la brume;
★ vers 1200m disons, on sort de la brume et on entre dans la forêt des pins canariens, jusque vers les 1800m;
★ entre 2000 et 2500m, la caldeira et la montée progressive vers Montaña Blanca;
★ la montée raide jusqu’au refugio del Teide à 3400m;
★ l’ascension finale à l’aube jusqu’au sommet à 3700m;


Voici le tracé de la montée jusqu’au refuge du Teide, puis le passage par le sommet avant de redescendre par le Pico Viejo, la Caldeira puis Canadas vers Vilaflor. Plus de photos de Ténérife.

Un taxi vient de me déposer sur le petit parking de la plage del Soccoro. J’entame tout de suite la remontée de la route goudronnée (que je viens d’ailleurs de descendre en taxi) jusqu’au village de San Vicente.


La playa del Soccoro d’où je pars pour une longue journée en montée.

J’essaie de trouver le sentier qui devrait couper directement, mais puisque je n’ai pas de véritable carte, je décide de remonter le long de la route et la petite ville de Los Realejos qui s‘étend en longueur et perpendiculairement à l’océan.


“Au premier plan Los Realejos que je viens de traverser, et plus loin au fond la Orotava où j’ai passé 3 jours à faire la fête. Plus de photos de Ténérife.

La première partie de la montée longe une crête, sans doute une ancienne coulée volcanique comme il y en eu beaucoup sur l‘île. La montée se fait dans la brume et il fait même un peu frais. La climatologie est d’ailleurs assez intéressante sur Ténérife, avec un étagement très marqué lorsque les nuages arrivent de l’océan et s‘écrasent contre le volcan.

Ainsi sur la côte nord, la brume occupe le terrain jusqu‘à ce que les pins canariens prennent le relai. Je déjeune en ingurgitant une grosse part de Gofio, ingrédient trans-traditionnelle de la cuisine des îles Canaries à base de farine de céréales grillées (blé, maïs, avoine et orge).


Le Gofio! Dans mon cas, on l’a préparé sous mes yeux au restaurant “El Carmen” à Icod de los Vinos en le mélangeant à du miel.


Je mange mon pain de Gofio au miel pendant la montée.

Je repars ensuite avec la force d’un Guanche. Le sentier continue de grimper (ce qu’il fera tout la journée) en suivant les pistes forestières sur lesquelles je m‘égare de temps en temps. Je finis par retrouver mon chemin facilement car désormais le sommet est visible; je navigue à vue. L’entrée dans la caldeira est marquée par cette petite église dont je ne connais pas le nom.


L’entrée de la Caldeira avec le Teide en Arrière plan. D’ici au sommet, encore 1700m de dénivelé.

Il doit être 14h et le soleil commence à se faire sentir lorsque j’entame la deuxième partie de l’ascension en direction de Montana Blanca. Après un nouveau petit égarement (petit aller/retour qu’on peut voir sur le tracé), j’avance sur un terrain très différent. Petits buissons au ras du sol, roche volcanique évidente (mes chaussures s’en souviennent), le sentier zigzague entre de gros blocs de roche crachés par la montagne lors de quelques épisodes tumultueux de son histoire. Vers 2500m et au delà lorsque j’atteins Montaña Blanca, les plantes ont disparu.


Vue sur la Caldeira vers 3000m. Au loin l‘île de Gran Canaria

La dernière partie de l’ascension avant d’attendre le refuge du Teide est notablement plus raide. Je sens nettement la fatigue de la journée lorsque je prends le pas de quelques randonneurs fraichement débarqués en voiture, étonnamment les premiers marcheurs que je rencontre depuis le matin. Je dois noter, ou bien est-ce du fait que nous sommes un lundi, que la randonnée n’est pas une activité très populaire ici en dehors des frontières du Parc Nacional del Teide.

Comme moi les randonneurs montent au refuge pour la nuit et faire le sommet le lendemain à l’aube. Le refuge est posé sur un petit replat à 3260m d’altitude et offre une vue fantastique. Je sors quelques temps après avoir diné mon gofio pour profiter de l’endroit. Le soleil se couche dans notre dos à l’ouest mais projette une superbe lumière sur toute la partie est et nord de Ténérife. On voit aussi au loin Gran Canaria.


L’observatoire de Ténérife au soleil couchant


Coucher de soleil et ombre du Teide. Au premier plan le bord de la caldeira, au loin Gran Canaria. Plus de photos de Ténérife.

La montée finale du Teide

Lever et départ vers 5h. Je pars à jeun, je mangerai plus tard tranquillement dans la descente. Ce départ à la frontale me rappelle l’ascension du Kilimandjaro que je viens de réaliser il y a une dizaine de jours. L’ambiance est unique, la véritable impression de vivre les choses, le regard qui englobe toute l‘île et au delà ce sentiment d’avoir les pieds sur Terre au premier sens. Une fois là haut, on profite en attendant le soleil.


Je fais un petit arrêt dans la montée. Je sors mon trépied, et fais cette photo de l‘île de Ténérife qui dors encore. Eclairage public, nuages bloqués contre le relief, ciel étoilé. Il est 5h39


A l’inverse de la veille, l’ombre est portée plein ouest. Sur la droite, l‘île de La Gomera, et tout au fond au pied à droite de l’ombre, El Hierro. Il est 7h03


Autoportrait au sommet éclairé par les premières lumières du soleil. Au loin l‘île de La Palma. Il est 7h13


La mer de nuages. Il est 7h15. Plus de photos de Ténérife.

Je redescends ensuite tranquillement. Alors que nous étions une vingtaine au moins au sommet, nous ne sommes que quelques-uns à prendre la direction du Pico Viejo. La partie qui mène au second sommet de l‘île traverse une coulée de lave récente (récente dans les temps géologiques hein) et particulièrement abrasive. Alors que je saute un peu vite sur quelques gros blocs instables, je glisse et déchire la fesse droite de mon pantalon.

Ralentis par cette pause qui n’aura pas de conséquence, je mettrai environ 1h30 pour descendre du sommet jusqu’au petit promontoire qui permet de jeter un oeil dans le cratère du Pico Viejo.


Pico Viejo

Le sentier fait une large boucle pour rejoindre le Parador et le centre de Caldeira où je profiterai du restaurant touristique pour prendre un vrai repas, l’estomac un peu fatigué par le Gofio qui m’accompagne à chaque repas depuis le petit déjeuner de la veille. Pour donner une idée de la longueur de cette partie, je mettrai 2h pour rejoindre le parking depuis Pico Viejo.


Dans la descente entre Pico Viejo et le centre touristique du Parador qu’on peut voir au loin. Plus de photos de Ténérife.


Les touristes qui visitent les lieux à quelques pas du parador, en particulier el Roque Cinchado.

Je quitte la zone touristique pour prendre la direction du col qui fait basculer sur le coté sud de l‘île. Quelques mois auparavant j’avais fait cette randonnée qui permet d’atteindre l’Alto de Guajara.

Cette fois-ci je file directement dans la descente qui prend la direction de Vilaflor le point final de ma traversée. On voit ici nettement que le sud de l‘île ne profite pas des nuages qui amènent le brouillard et l’humidité que j’ai traversés la veille en montant de Los Realejos. Assez vite, je retrouve la forêt de pins canariens puis finalement bien heureux d’apercevoir le village de Vilaflor.


En descendant vers Vilaflor, le versant sud de l‘île est sensiblement moins humide que le nord.


Le village de Vilaflor, à quelques minutes de la fin d’une belle balade. Plus de photos de Ténérife.

J’arrive vers 16h à l’hôtel “El Sombrerito“ qui m’avait hébergé 8 mois auparavant. Je reconnais le patron, lui non. Peu importe le temps passe et cette histoire n’est qu’une anecdote pour lui.


Je commande une grande bière, des papas arrugadas y mojo, la soupe de l’abuela et je pense déjà à la suite.. Plus de photos de Ténérife.

Préparation votre randonnée au Teide

Quelques infos supplémentaires officielles : Le refuge du Teide – Refuge Altavista et le Parc national du Teide sur le site de l’office de tourisme de Ténérife.
Pour le reste, je vous conseille vivement de contacter l’excellent Felix, un guide de Ténérife très sympa. Et francophone. Il vous emmènera à la découverte culturelle de l‘île. Vous pouvez aussi contacter tenerife-adventure.com si vous vous sentez l’âme d’un fast hiker.

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