Le championnat du Monde de pêche au Cabillaud

Pêche aux Lofoten

Jamais je n’aurais pensé un jour participer au Championnat du monde de Pêche au Cabillaud. Je suis breton, mais breton des terres et je n’ai jamais trop aimé la mer. J’ai ainsi une forte tendance à soufrir de ce mal qui retourne l’estomac et vous pousse à nourrir les poissons. Lorsqu’on m’a proposé de venir assister à cet événement international où les norvégiens mettent un point d’honneur à montrer à leurs visiteurs du sud comment on se tient en mer, j’ai eu un instant d’hésitation.

Le championnat du Monde de pêche au Cabillaud

Les Îles Lofoten et le Cabillaud, c’est une histoire. Depuis des siècles, l’archipel est connu pour ce poisson qui fit sa richesse, le Skrei, une espèce de cabillaud migratrice qui descend au printemps depuis la mer Barentz pour frayer dans l’immense baie qui sépare les Lofoten du reste de la Norvège. Cette pêche remonte ainsi au 10ème siècle et connu un important développement lorsque les Vikings commencèrent à le faire gouter lors de leurs voyages, souvent marchands, dans l’Europe que nous connaissons. De là viennent proviennent quelques produits : le foie de Morue et son huile, et le bacalhau portugais.


Le poisson est séché à l’air libre, ce qu’on appelle Stock Fish, ou Bacalhau

Le Championnat du monde de Pêche au Cabillaud est ainsi un événement tout à fait important, tant au regard du rôle du Cabillaud dans l’industriel locale que pour le symbole historique qu’il représente pour la région.

J’ai rendez-vous le matin vers 9h sur un des quais du port de Svolvaer. Je retrouve Kristian, mon hôte pendant quelques jours, et je fais connaissance de mes quelques camarades d’un jour, un allemand, un danois, deux hollandais, des pêcheurs experts venus ici pour en découdre avec la Morue. L’un des deux hollandais, Pim, était déjà présent l’année précédente et avait gagné le prix de la plus grosse prise avec un poisson d’une vingtaine de kilos.


Les bateaux en course quitte le port de Svolvaer.

Nous prenons place à bord d’Elltor notre navire d’un jour et quittons le port groupés avec les autres bateaux en direction du lieu de pêche que chacun aura choisi, le plus souvent sur les conseils du capitaine qui est évidemment un pêcheur professionnel. En route, nous préparons nos lignes et constatons que nous allons globalement tous dans la même direction. J’imagine, je visualise ainsi un gigantesque banc de poissons qu’une vingtaine d‘équipages internationaux va consciencieusement sillonner pendant plusieurs heures.


En route pour la zone de pêche.


Préparation des lignes alors que notre bateau se rend sur le lieu de pêche.

La pêche débute lorsque le bateau s’arrête. Elle va durer plusieurs heures.
Rappel : il y a deux titres de champions, le premier pour celui qui rapporte la plus grosse prise et le second pour celui qui sortira le plus de poisson.
Je ne pêche pas et je profite de l’ambiance à bord en prenant quelques photos des autres bateaux avec lesquels nous croisons les lignes lorsque nous changeons de place. Progressivement le temps change, et la mer commence à s’agiter ce qui n’est pas sans m’inquiéter. J’ai beau avoir pris une de ces pastilles proposées par Kristian “Take one of these if you don’t want to get sick” sur le quai de Svolvaer, je commence a ressentir les effets du roulis-tangage du bateau chahuté par les vagues.


Dernière photo, alors que la mer devient forte et les premières vagues sur le pont.

Les choses s’aggravent en début d’après midi lorsque je vois Kristian vomir par dessus bord; un norvégien, quand même! Comme un avertissement, et alors que mes camarades compétiteurs restent concentrés et remontent encore et toujours leur poisson, je prends une dernière photo et me cale fermement dans un coin. Le bateau est perpendiculaire au vent et la houle le prend gentiment de coté, générant une instabilité générale peu agréable pour les gens comme moi qui n’ont pas le pied marin.

Un autre voisin journaliste assis sur le banc collé contre le bastingage se retrouve ainsi par terre après une embardée du bateau. D’un regard au sourire forcé il m’annonce qu’il est aussi bien ici. Pendant encore une heure, les vagues taperont allègrement les flancs du bateau, nous arrosant parfois copieusement, jusqu‘à ce que le capitaine décide de rentrer Elltor au port.


Une des plus belles averses de neige que j’ai eu l’occasion de voir.


En direction de la halle aux poissons pour le comptage des prises.

Lorsque nous arrivons au quai, le grain qui nous a fait quitté la zone de pêche s’est transformé en tempête de neige. Une fois arrimé au pont, les poissons dans leur caisse, tout le monde se dirige vers la grande halle où sont comptabilisées les prises de chacun. C’est ici que se poursuit la journée, événement majeur dans la ville où les habitants des villages voisins viennent boire un verre et faire la fête.


Évidemment, vu comme ça… En fait les poissons se font décapiter et leur gorge récupérée sur une grande pique. On en fait un excellent repas traditionnel, une sorte de panné de gorge de morue. C’est en général les enfants qui s’occupent de cette tache leur permettant de se faire quelque argent de poche.

Alors même que la houle menaçait le bateau de rejeter le passager temporaire que j‘étais, je savais que ça ne durerait pas longtemps. Je savais que le soir même je serais à l’hôtel ou dans le sauna devant le fjord. Je n’ai pas vraiment perçu même si je le sais que le métier est de rester en mer de longues heures chaque jour, les mains dans l’eau salée sous la neige, les reins courbés par la canne sortant le poisson. Une évidence qu’on oublie car c’est la fête.

J’aurais aussi pu vous raconter une notre histoire, celle des bars où les norvégiens se rendent lorsque l’hiver devient long. Ils se trouvent non loin de là et tout aussi près du port. les femmes y attendent les marins et lorsqu’ils sont encore en mer, les étrangers sont bienvenus.

Pour plus d’informations, je vous envoie vers ces quelques sources :

S’il vous prenait l’envie de vivre l’expérience d’une pêche en mer au large des Lofoten, je vous conseille Nusfjord et son bateau Elltor, et pour découvrir les Lofoten en raquettes, ce circuit de mon ami David.

Ce billet fait partie d’un sujet sur les Îles Lofoten en hiver : photos des Lofoten en hiver, la pêche au cabillaud, les Lofoten en hiver et découverte de la randonnée en raquettes sur les Lofoten