J'ai participé à la Yukon Quest

La course de chiens de traineaux

Je prends mon déjeuner dans un coin de la salle principale de l’Aurora Inn, une petite auberge à peine excentrée dans le centre de Dawson City. Sur la table à coté, une fille emmitouflée dans une grosse parka, c’est Abbie West me dit Paul, une des concurrentes de la course. “Nous la sponsorisons en partie en offrant l’hébergement”.

J'ai participé à la Yukon Quest

Je m’approche d’elle et commence la discussion. Comme beaucoup de mushers sur la Yukon Quest et à part quelques superstars de la discipline, elle n’est pas professionnelle. Elle occupe un emploi de Barmaid à Fairbanks, et travaille aussi à la communication de la Yukon Quest. Évidemment donc, elle ne vit pas du mushing mais possède 20 chiens qu’elle entraine spécifiquement pour la course. Ce sport est une passion, et alors que la course est encore loin d‘être terminée (ici à Dawson City les coureurs n’en sont qu‘à la moitié), Abbie sait déjà qu’elle va courir la prochaine édition en 2014.
Abbie terminera en 8ème position cette édition 2013.


Abbie West peu après le départ de la Yukon Quest 2013

La première fois que j’ai entendu parler de la Yukon Quest remonte à plus de 15 ans. Je lisais à l‘époque un petit jeune des expéditions nordiques, Nicolas Vanier, qui commençait déjà à se faire connaitre dans le monde du dog mushing. Il participait en 1997 à cette Yukon Quest de 1600km entre Whitehorse au Yukon et Fairbanks en Alaska. Je ne pensais pas qu’un jour je serais moi même présent avec mon appareil photo sur la ligne de départ. Et pourtant.

J’arrive à Whitehorse la veille, et déjà je ressens les prémices de l‘événement. Un peu partout en ville, des trucks et des remorques transportant les attelages, des chenils ambulants et des chiens excités. Je rentre à l’hôtel et je m’installe dans ma chambre, surchauffée comme toujours dans les pays du Grand Nord. C’est un fait, le capital chaleur n’est pas négociable, même quand il s’agit de se rendre de sa maison à sa voiture. Les Mushers eux devront faire sans pendant la dizaine de jours de la course qui les attend.


Lance Mackey interviewé par les journalistes au départ de la Yukon Quest 2013

Je me rend le lendemain au départ sur une grande place ouverte à l‘écart du petit centre ville. Chaque équipe se prépare, les chiens sont sortis de leur remorque, les familles et fans échangent avec les Mushers. Je remarque un attroupement, des micros et des cameras autour d’une des équipes et de son musher. Lance Mackey est une ultra star dans la région, au Yukon et en Alaska. Il a gagné la course 4 fois, il a aussi gagné 4 fois l’Iditarod sans compter son combat contre le cancer. Le nom de son équipe parle de lui même, “ComeBack Kennel. Je l‘écoute répondre aux questions des journalistes, parler, et je retrouve ce caractère déjà constaté sur les quelques mushers que j’ai pu rencontrer : minimalisme de la parole, pragmatisme en toute situation, force contrôlée, et ce qu’il faut pour maitriser une meute de 14 chiens de compétition.


Sur la ligne de départ de la Yukon Quest 2013, à son poste

Chacun doit libérer l’espace et laisser les mushers se préparer pour le départ. Je file vers la ligne et je m’installe derrière les barrières grâce à mon laisser passer officiel : je vais faire des photos.
Les attelages s’avancent un par un, intervalle de quelques minutes. C’est l’occasion pour l‘équipe de se présenter devant les spectateurs amassés sur les bords de la piste, le groupe pose autour du traineaux ou chacun près de la paire de chiens dont il a la charge. L‘émotion est palpable jusqu’au moment du départ où le speaker annonce le nom du concurrent. Le coureur s‘élance sous les applaudissements et les houras, lui même évidemment acteur de l‘événement levant les bras ou criant sa joie vers les chiens. Ceux-ci libérés se donnent sans mesure et il faut tout le poids du Musher debout sur le frein pour ralentir l‘équipage dans une gerbe de neige. Le spectacle de ces 14 chiens lancés à bloc est impressionnant.


Le départ de la Yukon Quest 2013

J’aurais l’occasion de revoir les coureurs à plusieurs reprises, plus loin à quelques kilomètres à l’extérieur de la ville, puis ils partiront pour 10 jours de course seuls dans le grand espace.