La ville d'Ilakaka

L'espoir du saphir

Visiter un pays c’est ne pas se contenter d’aller dans les endroits touristiques. Comme je dis qu’il n’est pas nécessaire d’entrer dans le Parc National de l’Isalo pour découvrir l’Isalo, on peut aller un peu plus loin dans le voyage et s’arrêter où personne ne s’arrête et visiter une ville à priori anecdotique lorsqu’on y passe en voiture. Ainsi la petite ville d’Ilakaka sur la RN7, qui n’existait pas il y a encore vingt ans, mérite un arrêt à bien des égards.

La ville d'Ilakaka

Il fût un temps où les gens dépourvus, qui n’avaient plus rien à perdre, traversaient au prix de leur vie les continents en quête de gloire. L’Eldorado et l’espoir qui va avec a sans doute disparu aujourd’hui dans l’esprit européen, car on ne quitte plus sa terre pour remuer les graviers des fonds du Yukon ou de Californie (quoique, certains meurent en méditerranée). Pourtant les Dawson City et Bodie existent toujours bel et bien quelque part en Amérique du Sud, en Asie, et ici à Madagascar.

Ilakaka, la ville des chercheurs de saphirs. Bien étrange ville posée telle une verrue sur la route nationale alors qu’il n’y a jamais rien eu ici que des troupeaux de zébus et quelques éleveurs.

Cette petite ville sort de terre à la fin des années 1990 lorsqu’un géologue français découvre un gisement de saphir dans une rivière en banlieue de l’Isalo. Très vite, à l’image d’une ruée vers l’or, les démunis et fiévreux en quête d’aventure viennent de tout le pays pour creuser et tamiser les alluvions de la rivière appelée Ilakaka. La ville d’Ilakaka voit alors le jour.

La mine à ciel ouvert

Il n’est pas très conseillé de se promener dans les zones de prospection le long de la rivière. D’abord parce que le terrain n’est pas sécurisé et qu’il est constellé de puits de forage d’où vous ne pourriez pas sortir. Ensuite parce-que dans un pays où la population est parfois démunie, on peut supposer qu’un endroit où en plus règne l’appât du gain et l’argent facile un “Vaza“ un peu curieux n’est pas forcément le bienvenu voire une cible facile.
La rue principale d’Ilakaka offre déjà un aperçu de ce qu’on pouvait imaginer d’une ville de chercheurs d’or à l‘époque du Far-West. Si on ajoute à cela le fait que le saphir qu’on trouve ici coûte plus cher que le métal jaune, j‘étais curieux de passer derrière les barrières. Je me suis donc promené, accompagné par un des hommes de main du propriétaire d’une des mines après avoir été présenté par une connaissance locale de Malagasy Tour.

Ainsi, ces mines à ciel ouvert comme celle en photo sont creusées à la pelle et à la force des bras. Il faut environ 8 mois pour dégager un trou qui fera une trentaine de mètres de diamètre et un peu plus d’une dizaine de profondeur. Pour cela, 50 terrassiers se relaieront toute la journée pour 10.000 ariarys soit 3 euros par jour d’un travail difficile. J’ai posé la question, mais pourquoi ne pas utiliser une pelleteuse qui serait sans doute beaucoup plus rentable pour l’exploitant? La réponse m’a surpris, “il faut bien donner du travail aux gens”.

Un tamiseur, expert dans l’art de reconnaitre les pierres parmi d’autres pierres.

Une fois la mine ouverte vient son exploitation. L’ensemble du gravier dégagé (toutes ces alluvions sont le résultat de millénaires d‘érosion en amont) est passé au tamis dans l’espoir d’y trouver les pierres précieuses. Ici à Ilakaka on trouve du corindon, dans toutes ses variantes, et surtout des saphirs qui en sont l’espèce la plus recherchée, la véritable pierre précieuse (diamant – saphir – rubis – émeraude).

En amont d’Ilakaka, une fois que le fond de la rivière a été ratissé par les “véritables” chercheurs, les plus démunis y tentent leur chance. Malheureusement souvent, ce sont les enfant qui s’y collent…

Une femme remuant les graviers dans l’espoir d’y trouver quelque chose, même si à cet endroit tout a été retourné cent fois.

Je recommande vraiment de faire l’effort de s’arrêter quelques heures à Ilakaka si vous naviguez sur la Nationale 7, dans un sens ou dans l’autre. Même si on est encore plus touriste dans un endroit comme celui-ci et qu’on ne pourra pas y changer le monde, on y rencontre des situations qu’on pense parfois révolues. L’exploitation complète, l’espoir d’une situation meilleure, et la vie qui continue parfois même avec le sourire.

Un sourire entre deux maisons temporaires à deux pas des mines.

Masque de boue pour prendre soin de soi et avoir un beau visage!

A l’entrée de la ville d’Ilakaka, la rivière fait étale. Les gens y font leur lessive, se lavent eux-même, et toujours encore tentent d’y trouver la pierre synonyme de liberté là où des centaines d’autres ont essayé avant eux.

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